Full text: Almanach des dames (1810)

( 41) 
tant les pas de la souris, qu’on apprend à les distingner. On 
connoît tout , quand on a tout craint. Une femme, qui dans 
un regard plus sérieux de son amant a cru voir la diminution 
de son amour, sait bientôt à quoi tient en lui le sérieux , la 
gaieté , l’air tendre ou distrait ; elle sait ce qui est humeur , 
caprice ou mécontentement, ennui ou préoccupation. De 
même celle qui dans le monde veut plaire, et craint de dé- 
plaire, a bien vite démêlé les motifs de l’accueil qu’elle y 
reçoit, les circonstances qui peuvent le rendre plus ou moins 
flatteur , les probabilités qui lui permettent d’y compter ou lui 
prescrivent de s’en méfier. Elle a regardé tout ce qui l’en- 
toure , parce qu’elle n’est tranquille sur rien. Dites-moi de 
quoi vous pouvez être inquiète, vous que les succès prévien- 
nent , que les hommages poursuivent. Pourquoi faire regarder 
à vos pieds , quand vous n’avez à marcher que sur des fleurs. 
Mon enfant, de long-temps vous ne connoîtrez le monde ; 
Dieu veuille que vous ne le connoissiez jamais, ce sera une 
preuve que vous lui plairez toujours , de même que madame 
de C**., aigre, sèche , laide et bossue, ne peut jamais se 
flatier de le connoître, parce que jamais elle ne peut se 
flatier de lui plaire. Madame de Maintenon disoit : Je ne 
connois pas les grandeurs , j'en ai été trop loin et trop 
près. Elle ne put jamais sentir le poids de la grandeur des 
autres : elle y échappa d’abord par son abaissement , ensuite 
par son élévation , et nous ne sentons bien que ce qui pèse 
sur nous. Nous n’avons bien examiné que ce qui nous blesse. 
Les douleurs de la meurtrissure nous avertissent de la forme
	        
Waiting...

Note to user

Dear user,

In response to current developments in the web technology used by the Goobi viewer, the software no longer supports your browser.

Please use one of the following browsers to display this page correctly.

Thank you.