Cunégonde ; je la trouvois trop peu jeune , et je crois que j'ai
fait une soitise.
Quant aux princesses tragiques, j'en avois dernièrement beau-
coup trop; aujourd’hui j'en ai trop peu : l’une avoit, dit-on,
ua tendre engagement, ei cela mène plus loin qu’on ne pense ;
elle est effectivement fort loin; une autre, entraînée par un
penchant irrésistible pour les roubles, à pris le même chemin ;
il n’y à pas jusqu’aux confidentes qui ne s’en mêlent, et ily a
gros à parier que j'en perdrai une très-belle. Mais ma Phèdre
me reste ; nous lui avons donné ce nom, qui convient à la beauté
malheureuse, le jour même de ses débuts et de ses brillans
succès ; nous l’appelons par sobriquet Théodore depuis qu’elle
a endossé l'habit de page : Phèdre-Théodore est un talent très-
beau; le ciel nous le conserve ! Après lui, nous n’avons plus
que la petite colonne de la tragédie, ainsi que l’a baptisée notre
journaliste : cette colonne est d'une foible élévation ; mais elle
est de bon goût, et plait à l’œil : je la conserve précieusement.
Quant à mon opéra-comique , il est en désarroi, dispersé, en
voyage ; au défaut d'argent à Beaugency, il en a été chercher dans
les environs. J’avois une actrice aimable et piquante , belle et
jolie ; je la chargeois de représenter toutes les belles personnes
de l'histoire anc'enne et moderne, et j’avois arrangé pour elle
une petite galerie dont elle étoit le seul et bon portrait : elle
court de triomnhes en triomphes ; quoiqu’elle voyage très-vite,
les couronnes se fixent sur sa tête, et les vers qu’elle n’a pu
recevoir lui sont envoyés poste restante. On lui en com-
pose même, dii-on, tout le long du chemin , de manière qu’en