234
CORRESPONDANCE
fert et jette du tout entre les bras des dits Turcs , pour estre
maintenu et favorisé en son dessain , ayant pris le tiltre de
prince de Transilvanie sous l’estendart et la protection d’i-
ceux(1); ce qui défavorisera grandement les armes chrestien-
nes, de quoy sont blasmés les autheurs des oppressions qui ont
forcé ceux du pays de franchir ce sault. (2)
J’ay veu le marquis Spinola, passant par ce lieu, retournant
d’Espagne en Flandres. Le roi d’Espagne luy a donné tout
pouvoir sur les forces et deniers qu’il employé au dit pays,
avec quoy il espéroit faire de grands effects, et pour le moins
reprendre et nestoyer ceste année l’Escluse et le dit pays de
Flandres, mais je double fort que les effects y respondent; car
j’entends que les Provinces Unies sont fortes et plus disposées
d’entendre à l’offensive que de se tenir à la deffensive, de quoy
nous serons bientost esclarcis; car voicy le temps que cha-
cun debvra sortir en campagne, pour commancer à mener les
mains et descouvrir ses dessains.
Quant au roy d’Angleterre, il est bandé plus que jamais à
fonder et assurer sa neutralité en toutes choses , de quoy je
desire qu’il se trouve aussy bien que je luy porte d’affection.
Il a envoyé en Espagne son admiral grandement et magnifi-
(1) Stephan Boctskay, qui s’empara d’une grande partie de la Hongrie. Il
fut élu prince de Transylvanie, et obtint même de l’Empereur l’investiture de ce
pays comme d’un fief dépendant de la Hongrie. Voyez les lettres suivantes.
(2) La Contribution turque, qui était payée par tous les princes d’Alle-
magne, et même par les Etats Protestans, était principalement employée par
les Catholiques à persécuter les Protestans de la Hongrie.