CORRESPONDANCE
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de faire la dite levée en mon nom, à quoy il vouloil l’employer,
et pourquoy il a usé de tel artifice? J’avois esté adverty de Lor-
raine du bruit de la dite levée, quand vostre lettre m’a esté
apportée, mais l’on ne disoit pas que j’en fusse l’autheur, et en
parloit on incertainement. Depuis, l’on m’a mandé que le dit
bruit estoit esvanouy, et je vous prie de ne laisser à me faire
sçavoir ce que vous en avez apris.
Le roy d’Angleterre, mon bon frère, ayant conclud la paix
avec celuy d’Espagne, a entrepris d’accorder les différends que
j’ay avec le dernier sur le faict du commerce. A quoy il a
donné tel advancement que je doibs espérer que l’effect s’en
ensuivra, si le conestable de Castille, à son arrivée auprès du
dit roy d’Angleterre, où il est de présent, ne l’empesche. Si le
dit accord se parachève, le dit roi d’Espagne deschargera mes
subjects du payement des trente pour cent; quoy faisant, je ré-
vocqueray les deffences que j’ay faictes à mes subjets de traf-
fiquer aux pays du dit roy : lequel enfin recepvra plus de dom-
mage que d’utilité d’avoir ordonné le dit impost, estant si ex-
cessif et intolérable qu’il est; et toutesfois il incommode peu
les Hollandais et accommode encores moins les affaires des
archiducs. Nous verrons bientost si la paix avec le dit roy
d’Angleterre, laquelle les Espagnols et eux ont acheptée chè-
rement, leur vaudra ce qu’elle leur couste ; car plusieurs en
doubtent, [et je suis de ce nombre, me promettant que le roy
d’Angleterre, mon bon frère, gardera la parole qu’il m’a donnée,
et qu’il m’a encores confirmée depuis la dite paix; qui est qu’il
préférera lousjours mon amytié aux autres, et qu’il n’abandon-